Doit-on consulter un ostéopathe quand tout va bien ?

Par Quentin Gerardin, ostéopathe dans la petite ville de Trets (Bouches-du-Rhône)

Vous êtes-vous déjà fait la réflexion que cela faisait longtemps que vous n'étiez pas allé voir votre ostéopathe ? Mais comme vous n'aviez mal nulle part, quel intérêt de prendre rendez-vous ? D'un autre côté, si vous attendez trop, peut-être que votre ostéopathe vous dira que vous auriez dû venir avant d'avoir mal. Quel dilemme ! Pour nous éclairer sur la position à tenir à ce sujet, Quentin Gerardin a accepté de répondre à nos questions et, cerise sur le gâteau, il nous dévoile en bonus, quelques morceaux choisis de sa vie d'ostéopathe !

Qui est Quentin Gerardin ?

Ostéopathe depuis onze ans, Quentin a découvert ce métier en terminale, grâce à son grand-père alors cardiologue et qui, dans un premier temps, avait fait la rencontre d'un chiropracteur. Celui-ci s'était aperçu qu'un certain nombre de ses patients, qui venaient pour des douleurs thoraciques, n'avaient en réalité que des restrictions de mobilité vertébrale.

Il réglait donc ces maux rapidement et sans utiliser le moindre médicament. Suite au décès de ce thérapeute, le grand-père de Quentin a découvert l'ostéopathie et y a trouvé plus de douceur pour la même efficacité.

Quentin Gerardin, ostéopathe à Trets

À l'époque, Quentin envisageait de se lancer dans des études pour devenir kinésithérapeute, car il aime depuis toujours réparer et comprendre comment fonctionnent les choses. (Sa maman le voyait ingénieur.) D'autre part, étant à cette époque plutôt actif sur le plan sportif, notre interviewé avait connu quelques petites blessures qui avaient été à l'origine de sa rencontre avec la kinésithérapie. En parallèle, son papa qui avait fait des études de kiné avant d'embrasser une carrière de militaire, apprenait à Quentin à masser et il adorait ça ! Alors Quentin a mis tout ça dans un shaker, en y ajoutant une réponse-clé de son grand-père. En effet, quand on lui posait la question : Quelle est la différence entre kiné et ostéo ? il répondait :

Eh bien, un ostéo, c'est comme un kiné, en plus complet !

Le grand-père de Quentin

Précisons que ce point de vue n'engage que ledit grand-père ! Ce sont tous ces éléments mis ensemble qui ont décidé Quentin à se lancer dans des études d'ostéopathie car, tant qu'à faire, autant choisir quelque chose de plus complet. Direction donc l'école d'ostéopathie !

Un parcours professionnel toujours en mouvement

Je suis un ni ni

Quentin Gerardin

Comprendre : ni kiné ni médecin.

Quentin a été diplômé après cinq ans d'études au sein de l'Institut Supérieur d'Ostéopathie d'Aix-en-Provence. Pour ne pas faire mentir le dicton : Quand on aime, on ne compte pas, il a fait une sixième année pour se perfectionner en ostéopathie pédiatrique et périnatale. En ostéopathie, il est d'usage de dire : La vie, c'est le mouvement, alors Quentin a appliqué cela à la lettre en changeant souvent de cabinet. Il a tout d'abord effectué quelques remplacements, puis ses pas l'ont amené à Bandol, au Québec, à Marseille, à Gréoux-les-Bains, pour enfin se fixer à Trets. En parallèle, Quentin a eu l'occasion de devenir professeur en école d'ostéopathie. Il l'a vécu comme une réelle chance, car il trouve ce métier passionnant à partager. De plus, les étudiants permettent de progresser par les questionnements qu'ils proposent et qui obligent Quentin à réfléchir sur des questions qu'il ne se serait jamais posées autrement.

L'avis de Quentin sur ce qu'est l'ostéopathie (et qui n'engage que lui)

A défaut d'expliquer comment fonctionne l'ostéopathie, Quentin préfère donner son point de vue qui n'est pas forcément le même que celui de ses confrères. Pour notre interviewé, l'ostéopathie est une approche thérapeutique profondément basée sur l'humain et centrée sur l'être. La philosophie des ostéopathes (qu'ils partagent avec d'autres) est d'essayer de comprendre d'où provient un trouble fonctionnel. Pour cela, ils s'intéressent au patient sur son plan physique, mais aussi psychique (et pourquoi pas énergétique selon les thérapeutes) : c'est cela l'approche holistique.

Initialement, le fondateur de l'ostéopathie, Andrew Taylor Still, mettait en avant la force de notre corps à trouver ses propres solutions. (C'est ce qui s'appelle l'homéostasie.) De ce fait, le rôle de l'ostéopathe serait juste de permettre au patient de retrouver ce potentiel homéostasique en le libérant de lésions dites ostéopathiques. Pour sa part, Quentin est convaincu des capacités du métabolisme humain à trouver la stratégie qui lui permettra de continuer à avancer. Le terme de lésion a, depuis, été remplacé par restrictions de mobilité, car aujourd'hui, les ostéopathes savent que rien ne se déplace. (Sinon, c'est direction le cabinet de l'orthopédiste!) Par contre, le corps, dans une stratégie de protection, va être capable de limiter le mouvement d'une structure pour protéger quelque chose. À l'ostéopathe de trouver quoi ! La douleur est juste une alarme sonnant au gré de l'interprétation des messages perçus par le cerveau du patient, en provenance de ses capteurs mécaniques, thermiques et chimiques et en fonction du contexte de survenue. Parfois, cela est justifié, parfois non. C'est là encore où l'ostéopathe doit comprendre ce qui se produit chez le patient pour l'aider à solutionner son problème. Le praticien souhaite juste redonner du mouvement, car le mouvement, c'est la vie et le corps est fait pour bouger, pas pour rester immobile. Les ostéopathes savent aussi aujourd'hui qu'il n'y a pas plus puissant pour drainer, nourrir et lubrifier notre corps que de bouger avec de grandes amplitudes.

Exemple d'un cas pratique représentant pour Quentin une satisfaction particulière

Quentin prend l'exemple d'un cas relativement assez récent, concernant une patiente prenant rendez-vous pour une coxalgie (douleur à la hanche, ndlr), suite à un faux mouvement pendant un stress intense. (Une personne a fait un AVC devant elle.) Elle consulte quelques jours après. Le médecin, vu dès le lendemain, parle de coxarthrose (arthrose de la hanche, ndlr) et prescrit une radio. Prenant en considération qu'une coxarthrose ne survient pas du jour au lendemain, pour Quentin, ce diagnostic ne tient pas la route (même s'il est possible que sa patiente ait de l'arthrose, ce n'est, en aucun cas, la cause de sa douleur.) Quentin prend le temps de l'écouter, de comprendre le contexte et de lui expliquer comment fonctionne la douleur.

Au début de la séance, il est impossible, pour la patiente, de poser son pied droit sur sa cheville gauche, avec une rotation externe de hanche. Persuadé que le problème relève plus du contexte que de la mécanique pure, le rôle de Quentin est donc de redonner de l'assurance à sa patiente, par des mobilisations douces, pour qu'elle réalise que sa hanche peut tout à fait effectuer son mouvement de circumduction (mouvement de l'articulation au cours de laquelle l'extrémité éloignée de celle-ci décrit un cercle, ndlr). L'objectif était de casser l'association neuronale mouvement = douleur (pour faire simple). Quinze minutes après et avec un travail exclusivement loco-régional (ce que certains des confrères de Quentin n'appelleraient pas ostéopathique, car pas sur le corps dans son ensemble), la patiente pouvait monter son talon droit jusqu'à sa hanche gauche avec rotation externe, et cela, sans la moindre douleur ! L'approche globale pour Quentin, dans ce cas, fut d'avoir pu comprendre que le problème ne venait pas de la coxo-fémorale (articulation de la hanche, ndlr), mais du contexte de survenue et que le cerveau avait mis en place une protection locale qui n'avait pas lieu d'être (car il n'y avait rien de grave à protéger en dessous).

Moralité : savoir écouter et être curieux.

Le cabinets de Quentin Gerardin, à Trets

L'ostéopathie, ça bonifie !

Quentin trouve que l'ostéopathie est un métier magnifique qui a pour gros avantage que plus on vieillit, meilleur on devient ! La main s'affine, les apprentissages s'accumulent sans cesse et il est donné aux ostéopathes de faire de belles rencontres et d'avoir des échanges fort enrichissants avec les patients qui leur apprennent beaucoup de choses.

Le secret de... la réussite ostéopathique ?

Vu que la question est le secret, Quentin répond :

l'écoute

Quentin Gerardin

C'est-à-dire l'écoute du patient et de son histoire, mais aussi l'écoute palpatoire de son corps. Il y a un proverbe qui dit : La nature nous a donné deux oreilles et une seule langue pour parler moins et écouter davantage, Quentin y ajoute : et deux mains pour agir plus.

Au sujet du remboursement de l'ostéopathie par la Sécurité sociale

Concernant la fin de la phrase : Le remboursement de l'ostéopathie par la Sécurité sociale serait? Quentin n'a pas d'avis tranché sur la question, mais il pense qu'en tant qu'ostéopathe, il peut faire baisser les dépenses de la Sécurité sociale, en réduisant la consommation d'antalgiques et d'anti-inflammatoires. Donc, à ce titre, pourquoi celle-ci ne prendrait-elle pas en charge une partie de la consultation d'ostéopathie ?

Doit-on consulter un ostéopathe quand tout va bien ?

Il s'agit d'une question récurrente des patients à laquelle chaque ostéopathe répondra avec des arguments qui lui sont propres et qui n'engagent que lui. Ce sera donc le cas, ici aussi, concernant Quentin qui pense que la bonne question à retourner aux patients est : Quelles sont vos attentes ou votre objectif ? Ensuite, en fonction de leur réponse, les ostéopathes vont pouvoir ajuster la leur (de réponse, pas de vertèbre, hein ! Car on le sait, on n'ajuste rien !) Si le patient vous dit :

Tout va bien pour moi, mais je ressens une petite gêne sur tel ou tel mouvement ou dans telle situation

Le patient

alors oui cela vaut le coup de venir, car l'objectif de la personne - qui devient celui de l'ostéopathe - est d'essayer de retrouver une meilleure mobilité.

Si le patient annonce à l'ostéopathe que, vraiment, tout va bien, qu'il ne présente aucune gêne et qu'il est au sommet de sa forme, dans ce cas, Quentin pense qu'il est inutile de faire une séance puisque tout va bien ! Le risque serait de rendre les patients dépendants des traitements ostéopathiques, de leur laisser croire qu'ils sont potentiellement fragiles et que, s'ils ne viennent pas consulter, leur corps risque de les lâcher ou de devenir défaillant. Quentin a longtemps utilisé l'image de la voiture que vous amenez à la révision alors qu'elle n'a rien d'apparent, mais qui grâce à ce réflexe préventif éviterait les pannes. Aujourd'hui, il revient sur cette croyance. En effet, le corps n'est pas une simple machine mécanique, il est bien plus complexe et l'on sait aujourd'hui que les facteurs bio-psychosociaux ont un rôle prépondérant dans la douleur. C'est justement là qu'il est risqué de faire croire aux patients que sans l'ostéopathe, ils pourraient passer d'un état fonctionnel optimal à un état douloureux, voire à une blessure, avec le risque de les conditionner dans ce sens. Quentin insiste sur le fait qu'il s'agit de son point de vue et qu'il n'a pas la prétention de faire mieux ou d'avoir plus raison que ceux qui ont un avis contraire.

Consulter un ostéopathe

Pour Quentin, le but est plutôt de définir l'objectif de ses patients et ce qui motive une consultation chez l'ostéopathe, plutôt que de les inciter à venir sans raison. Pour une problématique douloureuse, Quentin explique à ses patients que, s'ils n'ont pas d'impératif particulier, ils peuvent laisser passer 48 à 72 heures avant de prendre rendez-vous, afin d'observer si leur corps ne résout pas le problème tout seul. Passé ce délai (constat personnel, mais arbitraire) un rendez-vous peut devenir intéressant pour que l'ostéopathe aide les patients à retrouver un état fonctionnel normal. L'objectif est, ici, de les faire prendre confiance dans la capacité de leur corps à trouver lui-même la solution. Si le patient a un impératif (Exemple : patient avec un torticolis ne pouvant plus regarder devant lui, mais obligé de prendre la route le soir même, car il est la seule personne à avoir le permis.), alors Quentin le recevra volontiers pour l'aider à atteindre son objectif qui est, dans ce cas, pouvoir conduire et rapidement.

Faites-vous confiance !

Quentin Gerardin

Pour savoir ce qui intéresse Quentin, allez sur son site !

Concernant son site, Quentin essaie d'y publier, de temps à autre, quelques articles sur des sujets qui lui plaisent. Il y met également des informations le concernant et le lien pour la prise de rendez-vous en ligne. Il partage aussi, dans les liens utiles, des articles qui ne sont pas de lui, mais qu'il trouve intéressants (de là à dire qu'il partage nos articles, il n'y a qu'un pas ;) ), et les coordonnées de thérapeutes dans les environs.